Patrice à La Sainte Lyon

Souvent à la fin d'un copieux repas bien que repus on se laisse tenter par une ultime petite friandise que l'on sait pourtant de trop mais bon la gourmandise….

 

Cette année donc après une saison de triathlon  bien remplie et au sortir d'un marathon devant clôturer la saison je me suis retrouvé presque par hasard sur internet sur le site de la Saintelyon trail nocturne de 70 bornes et la compulsivement et sans réfléchir j'ai cliqué sur " s'inscrire "la peur du vide sans doute.

Samedi premier décembre je me suis donc retrouvé à 17h00 à Lyon près du stade de Gerland  devant une navette qui m'a conduite à Saint Étienne. Après une petite heure de bus arrivée au parc des expos de Saint Etienne pour le retrait des dossards, organisation sans faille il faut dire que 6000 solistes et 4000 relayeurs sont attendus ce sent bon la compet bien rodée. Arrivée ensuite au village des exposants. Cela change radicalement de ce que l'on connait habituellement, pas une bicyclette à l'horizon pas la moindre roue Carbonne ni de combinaison moulante et minimaliste rose fluo ou de stand hawaïen. Ici les sponsors se nomment  Salomon, Petzl, Lafuma. Ca renifle la chaussette en laine tricotée main le godillot de montagne sa bruisse du bruit de la couverture de survie. Le cadeau qui tabasse un bonnet Salomon et pas destiné à la baignade tout est dit on est dans un monde ou l'on se pèle le tube de crème Labello remplace la crème bronzante au monoï avec effet scintillant. La gerçure remplace le coup de soleil  la température extérieure largement sous zéro contribue à l'ambiance.

Tout est tellement bien rodé qu'à 17h15 j'ai réglé toutes les formalités alors que le départ de la course est prévu à minuit. Si l'avenir appartient à ceux qui se lèvent tôt la montagne appartient à ceux qui couchent tard voir pas du tout. Plus de 6 heures à occuper ca laisse le temps d'enfiler ses chaussettes et son thermolactyl Damart bleu marine. Deux grands Halls sont prévus pour empiler les concurrents qui se remplissent assez rapidement. Premier test : rapidité. Pour passer le temps agréablement 60 chaises longues sont mises à dispo pour tout les concurrents ca en laisse 9940 debout. Ayant fait toute ma scolarité comme demi pensionnaire j'ai appris la survie en milieu hostile et je décroche le graal une belle chaise bleue la classe. Il y a un scène installée avec une sono qui envoie de la musique un poil trop fort de temps en temps un mec vient faire la promo pour des caleçons triple épaisseur fabriqués en laine de Yack 100% naturelle ou des lampes frontales intelligentes qui savent quand tu montes ou tu descend ou si  tu fais popo dans des sanisettes de compagnes et qui de ce fait régulent leur intensité lumineuse du grand art. Un clip sur la montagne qui passe en boucle et te fait préférer la mer au bout de dix passages mais bon ca passe le temps. Les halles ont maintenant bien remplies ca ressemble de plus en plus à un camp de réfugiés Kosovars faisant passer celui de Sangatte pour une réunion de famille intimiste. Les réchauds sont de sorties ca cuisine sa roupille ca se ballade en slip ou ca fait la queue pour les sanisettes. Pour occuper la foule ils organisent une remise des prix du trail, un truc pour initiés avec votes des internautes et tout le titoum. Meilleur espoir masculin, féminin, meilleur blog meilleure paire de chaussettes tout y passe j'écoute cela d'une oreille distraite un bandeau sur les yeux tentant de me reposer un peu avant la grande aventure.

Tout à coup le speaker chauffeur de salles distributeur de prix nous annonce le prix des plus de 80 j'ouvre un œil persuadé de voir arriver sur le podium notre Memeal notre Kevin ou Jean Michel et de me retrouver un instant en terrain connu mais en fait je reste en terre inconnue. Les nominés sont en faits des gugusses tous secs ayant visiblement eut le plus grand mal dans leur enfance à défendre leur gamelle à la cantine. Ils sont fins comme des passe lacets secs comme des coups de triques et si ceux là sont dans la catégorie plus de 80 mois je suis sumo. Bon le doute se lève assez rapidement dans la caté plus de 80 c'est des kilomètres pas des kilos en dessous les mecs là ils n'enfilent même pas les baskets c'est des bouffeurs de montagne et de dénivelé. Avec deux raisins secs et un verre d'eau ils font le tour du mont Blanc honteux je retourne à mon repos. Christine Aron vient nous souhaiter bon courage il est temps d'enfiler un petit coup vent et de sortir je quitte ma chaise les larmes aux yeux dès la porte franchie elles gèlent
Ca caille un petit peu quand même. Belle ligne de départ tout le monde allume sa lampe frontale le plus beau rassemblement d'ORL de France. On tape dans les mains  à la demande du speaker comme sur toutes les lignes de départ du monde mais avec les moufles ca rend pas terrible. Le maire de  Saint Etienne se croit obliger de nous faire un laïus en nous disant que une fois par an il trouve que le lyonnais  finalement sont pas si cons qu'ils en ont l'air mais que l'on du prochain derby de foot ils vont quand même pleurer leur mère non mais des fois.

Pan c'est partit…  en marchant c'est un peu compact cette affaire  et il faut bien 5 minutes pour commencer à trotter un peu. 6 bornes de bitume en hors d'œuvre  une ballade. Sortie de la ville on prend un chemin et la pas de préavis la Sainté la vraie commence. On choppe simultanément du dénivelé, de la glace et de la neige.Ca va durer plus de trente bornes cette affaire poses tes deux pieds en canard c'est la chenille qui redémarre en voiture les voyageurs la chenille par toujours à l'heure. Plus on monte plus il y a de neige les pieds en canard c'est pour pas tomber. Comme sur la route des vacances de ski des aires de chainages se mettent en place (j'ai découvert qu'il existait des chaines pour les baskets) moi je suis monté en pneus tous temps. Le froid aidant  après 6 heures À boire de la boisson d'attente le traileur pisse dans chaque virage une belle rangée de bonhommes ca fait des rails de sécurité c'est commode. Un long serpent lumineux s'étire dans les monts du Forez c'est joli. Ca court puis ca marche puis ca court. A ce stade  de la course tu n'as pas trop le choix c'est le groupe qui décide tu subis la dictature du schéma collectif. La montagne est vaste mais les sentiers étroits je tente bien  avec mon esprit de frondeur de m'en écarter mais la neige est molle est profonde donc la plupart du temps je me cale sur le mouvement. Fort heureusement l'envie de courir chez le traileur et comme l'envie de pisser chez le prostatique brève mais fréquente donc dans l'ensemble la progression se fait plutôt bien. 10 premiers kils 59 minutes la suite sera moins drôle. Premier ravito à 15 bornes c'est les galeries farfouniettes un jour de soldes je snobe en plus c'est le premier relais pour certains. Le fait de zapper me donne un peu d'air enfin façon de parler parce que de l'air on en manque pas un petit vent s'est levé et j'ai le pif qui gèle d'un côté. La progression dans la neige est pénible je suis dans le premier paquet de mille mais ca s'est pas tassé des masses elle bien poudreuse. Le vent forme de jolies congères que je peine à franchir avec mes congénères. Je double un petit bonhomme tout habillé en K-way avec le bruit du frottement du k-way la vache le même que j'avais quand je traversais la compagne Lorraine sur ma Motobecane 51V Orange (cette référence mécanique s'adresse à ceux qui ont connu Brigitte Bardot et Jane Birkin désirables). Dans la foulée j'en rattrape un en short tee shirt il doit se prendre pour l'Alain Bombard de la Sainté ou alors il a fait un pari à la con ou en fait il est simplement très con en tous cas il finira sûrement très gelé et pas finisher vu la température. On nous avait prévenu au brief les 36 premiers kilomètres seraient durs on ne nous a pas menti il fait un temps de chien et pourtant régulièrement on croise des supporters au bord des chemins venu encourager qui un pote qui un mari. Ma chérie elle est au lit je l'envie... ;Km 28 je franchis sainte Catherine en tout bien tout honneur je vous rassure et en 2h56 je suis gelé je change des gants remet une couche sur le dos. Cerveau en mode veille je marche je cours je marche zéro plaisir je hais la neige je conchie les sports d'hiver et je rêve d'un vin chaud au bord de la piscine. Mais bon à part geler sur place et laisser son corps aux chacals il n'y pas trop de solutions. Maintenant sous la neige de temps en temps il ya de la boue c'est bien je trouve ca donne un petit air  de retraite de Russie. Km 36 Saint Genoux 4h13 je suis content d'après eux ca doit s'améliorer. Effectivement la neige disparait peu à peu  on revoit la terre mais bon vu qu'il a plus fortement  plu et  qu'il gèle à pierre fendre le terrain devient carrément casse gueule. A partir de là c'est le début du concours du plus beau soleil. Tout le monde y va de sa figure de style ca se vautre collégialement le pire étant que certains tentent de se raccrocher au voisin. Un beau florilège de chutes faisant passer la prestation de Laetitia Hubert au programme libre féminin des championnats du monde de  patinage artistique  en 1991 pour une œuvre magistrale de maîtrise. Tout le monde ne s'en relèvera pas indemne le contact avec le sol n'ayant rien de chaleureux. Dans ce désordre on se fait quand même de temps à autre doubler par des gaillards dont les tendances zoophiles de leur génitrice leur donnent l'assurance du cabri. Impressionnants il faudra que je pense à bosser la technique mais bon tenter de deviner à la frontale si le sol est  dur ou mou monopolise toutes mes fonctions cérébrales et je me refuse donc à courir à certains endroits ce qui ne m'empêche pourtant pas de tomber régulièrement mais au moins je le fais au ralenti. Soucieux en Jarrest km 47, 5h42 ca devient un peu plus facile sans pour autant tomber dans la promenade mais la boue cède un peu de terrain au verglas des fois ca se combine ensemble avec les kilomètres je suis devenu un pro de l'équilibre et on me proposerait une traversée sur une corde  raide je dirais chiche. Je commence à avoir un peu mal au squelette j'arrive dans des distances qui sont pour moi terre inconnue donc quand je peux trotter je le fais tranquille et dès que ca monte je marche  tout le monde fait de même sauf les relais qui eux sont frais comme des gardons. On traverse quelques belles rivières de boue inutile de tenter de garder les pieds au sec.  KM 59 dernier ravito 7h06 pause technique. Fin des sentiers   on attaque le bitume je mes sens dans mon élément et même si les jambes sont un peu raides je repasse le cap des 11 kilomètres à l'heure pressé d'en finir. La fin du parcours est sans aucun intérêt c'est aussi chiant que de regarder Michel Drucker le dimanche après midi avec comme invité Michel Sardou. J'ai juste croisé sur un pont  un black teint en blond avec un short moule bite blanc et bleu (façon short de foot des années 70) ce qui m'a fait penser que l'on revenait dans le milieu urbain visiblement il avait aussi peu dormi que moi mais on n'avait pas parcourus les mêmes chemins. Une partie interminable sur les quais et enfin l'arrivée dans le palais des sports de Gerland 8h20mn18s 479ème pour un premier vrai trail je suis content  déjà de l'avoir fini et surtout car cela me permet d'arriver à l'heure du petit dej et que j'ai horreur de rater un repas.

J'ai vite fui le palais des sports le boucan de la sono après le calme des monts du Lyonnais me semble insupportable ce n'est pas l'heure de me contrarier. Dernière épreuve récupérer mon sac de fringues rapatrié par l'organisation depuis Saint Etienne. Quatre semi remorques de sac à dos de valises et de balluchons étalés sur le trottoir mais aussi sous la neige qui tombe dru depuis plus d'une heure  c'est un peu compliqué  mais bon après le chemin parcouru c'est une rigolade. Je n'ai pas réussi à voir Regis qui était aussi sur la course la faute à une batterie de portable défaillante je sais qu'il est arrivé vers neuf heures  bravo à lui dommage j'aurais bien aimé que l'on fasse un bout de chemin ensemble.

Bon je ne vous recommande pas la discipline vous serez quitte de me maudire si un jour vous en faites  et que cela se passe mal. Cette course peut être très différente avec d'autres conditions météo mais a priori cela fait partie du charme c'est comme Vladivostok ca ne se visite pas sous le soleil Je pense qu'il faut aimer la discipline pour la faire et se préparer spécifiquement donc ca chacun sait ce qu'il a envie de faire pour moi c'était la friandise de fin de repas je savais bien qu'elle serait dure à digérer. Du coup c'est ma dernière lettre de l'année  que je vous adresse la prochaine je vais la faire au père Noël…


Petit Papa Noel je voudrais :
Une paire de roues ZIPP, un maillot de bain fashion pas de chez Décathlon, de la crème solaire, des tongs, des lunettes de soleil………………..